40. Tous les processus éducatifs et, partant, toutes les institutions
d’éducation et de formation, allieront désormais à la dimension
scolaire, académique ou théorique, une dimension pratique conséquente.
Ce principe sera mis en œuvre progressivement par les voies suivantes:
- renforcer
les travaux manuels et les activités pratiques à tous les niveaux de
l'enseignement préscolaire, primaire et collégial ;
- instaurer une collaboration, basée sur le partage et l'exercice
synchronisé des responsabilités, entre les structures d’enseignement
général (y compris universitaire), d’enseignement technique et de
formation professionnelle, permettant la mise en commun et
l’exploitation optimale des équipements, des laboratoires, des ateliers
et de l’encadrement disponibles, conformément aux articles 158 et 159 de
la présente charte ;
- promouvoir la coopération à grande échelle entre les
institutions éducatives et formatives et les entreprises, les
coopératives et les artisans, en milieux urbain et rural, dans le cadre
de contrats d’apprentissage et de formation alternée, conformément aux
articles 49 à 51 ci-dessous, en assurant les conditions pédagogiques
requises ;
- ouvrir les institutions d’éducation et de formation sur le
monde du travail, de la culture, de l'art, du sport et de la recherche
scientifique et technique.
Réseaux d’éducation formation
41.
Les autorités d’éducation et de formation veilleront, de manière
progressive, tenant compte de la distribution et de la capacité
d’accueil des établissements, à instaurer, aux niveaux régional et
local, des réseaux d’éducation et de formation (REF), basés sur des
conventions et des règlements précis, organisant et répartissant les
activités pédagogiques, de sorte que chaque institution fasse ce qu’elle
peut faire le mieux et s’appuie sur des institutions connexes ou
voisines pour tout ce que celles-ci peuvent mieux faire.
Ces
réseaux auront fondamentalement pour but de confier, autant que
possible, les enseignements scolaires, théoriques ou académiques, aux
établissements d’enseignement général et lestravaux pratiques et
technologiques aux établissements d’enseignement technique et
professionnel.
42. Les réseaux d'éducation et de formation
susvisés seront pilotés par les autorités éducatives déconcentrées et/ou
décentralisées, conformément aux articles 144 à 153 de la présente
charte. Ils commenceront à être mis en place dès la rentrée scolaire et
académique 2000-2001, à titre d’expériences pilotes, tenant compte des
possibilités offertes en opérant de proche en proche comme suit:
a.
Au niveau de l’enseignement collégial, chaque fois que possible, le
collège sera relié en réseau à un centre voisin de formation
professionnelle, ou à des centres d’initiation des jeunes et d’éducation
féminine. Cette connexion visera à associer aux enseignements
fondamentaux de l’école collégiale l’acquisition de notions et de
savoir-faire techniques professionnels élémentaires, autant que possible
par l'ensemble des lauréats de cet enseignement et, à fortiori, pour
ceux d'entre eux qui accéderont directement à la vie active, en passant,
le cas échéant, par un apprentissage en entreprise.
b. Au
niveau de l’enseignement secondaire, et chaque fois que cela est
possible, le lycée sera relié en réseau à un centre de qualification
professionnelle, et/ou un institut de technologie appliquée, sur la base
de la proximité géographique et de la complémentarité scientifique et
technique. Cette connexion visera à assurer une répartition optimale des
volets théorique et pratique des enseignements dispensés aux apprenants
et, tout spécialement, à ceux d'entre eux qui s'orientent vers le cycle
de qualification professionnelle ou vers la filière du baccalauréat
d'enseignement technologique et professionnel.
c. Au niveau de
l’enseignement supérieur, l’intégration interdisciplinaire et
inter-institutionnelle pourra également se fonder, progressivement, sur
des réseaux régionaux, reliant les établissements universitaires, les
grandes écoles, les autres instituts et écoles supérieurs dispensant une
formation post-baccalauréat, selon la démarche préconisée à l’article
78 de la présente charte.
Passerelles entre l’enseignement général, la formation professionnelle et la vie active
43.
A la fin de l’enseignement collégial, les élèves non titulaires du
brevet de l’enseignement collégial peuvent être orientés vers une
spécialisation professionnelle sanctionnée par un diplôme du même nom
qui permet à son titulaire:
- Soit de rejoindre le marché du travail;
- Soit de continuer sa formation en qualification professionnelle, généralement après un passage dans la vie active;
- Soit encore de reprendre les études en accédant au tronc commun
de l’enseignement secondaire, conformément à l'article 73 de la
présente charte.
44. Les élèves titulaires du diplôme de
l’enseignement collégial peuvent être orientés vers une qualification
professionnelle sanctionnée par un diplôme du même nom qui permet à son
titulaire :
- Soit de rejoindre le marché du travail ;
- Soit de continuer sa formation en technologie appliquée généralement après un passage dans la vie active ;
- Soit encore de reprendre les études en accédant à la filière
de l’enseignement technologique et professionnel secondaire,
conformément à l'article 75 b, de la présente charte.
45. A
la fin de l’enseignement secondaire, les élèves peuvent être orientés
vers une formation professionnelle sanctionnée par un diplôme de
technicien qui permet à son titulaire:
- Soit de rejoindre le marché du travail en tant que technicien;
- Soit de continuer sa formation en technologie appliquée et
spécialisée, généralement après un passage dans la vie active, sous
réserve de satisfaire aux conditions requises pour l’accès à la filière
professionnelle concernée.
46. Les élèves titulaires du
baccalauréat technique et professionnel peuvent être orientés soit vers
l'Université, soit vers une formation en technologie appliquée et
spécialisée sanctionnée par un diplôme de technicien spécialisé qui
permet à son titulaire :
- Soit de rejoindre le marché du travail;
- Soit de poursuivre une formation supérieure en technologie, sous réserve de satisfaire aux conditions exigées .
47.
Après le tronc commun prévu au premier cycle de l’enseignement
universitaire, les étudiants peuvent être orientés vers les instituts et
les écoles supérieures de l’enseignement professionnel et technique,
éventuellement après un passage dans la vie active, sous réserve de
satisfaire aux prérequis en vigueur. Le diplôme obtenu au terme de la
formation dans ces établissements permet :
- Soit de rejoindre la vie active en tant que techniciens ou cadres supérieurs ;
- Soit de reprendre les études universitaires.
Ouverture de l'école à son environnement et à tous les horizons créatifs
48.
Les établissements d’éducation et de formation se rapprocheront des
organismes publics et privés capables de contribuer au renforcement du
volet pratique des enseignements par :
- l’échange de visites d’information et d’observation ;
- la diversification des matériels et supports didactiques ;
- l’organisation d’exercices pratiques ou de stages, selon l’âge et le niveau des apprenants ;
- le montage conjoint d’activités éducatives ou formatives,
telles que l’expérimentation de produits, de services, de procédés ou
d’équipements technologiques, ou encore la création et la présentation
d’œuvres théâtrales, musicales ou plastiques, ou autre.
Apprentissage et formation alternée
49.
L’apprentissage s’entend comme une formation se déroulant
principalement en entreprise, pour plus des deux tiers de sa durée,
pouvant aller d'une à trois années, et qui implique une relation
contractuelle, établie entre l’employeur et l’apprenti ou son tuteur
légal.
L'apprentissage s’organise principalement à deux niveaux:
a.
vers la fin de l’enseignement collégial, où il doit permettre aux
apprenants de ce cycle de compléter leur spécialisation professionnelle,
avant leur sortie vers la vie active conformément aux articles 50 et 51
de la présente charte;
b. au niveau du cycle de qualification
professionnelle, où il doit assurer aux apprenants de ce cycle
l'acquisition d'habiletés professionnelles qualifiantes, tout en les
imprégnant des réalités du monde du travail.
50. La formation
alternée est assurée approximativement à parts égales entre l’entreprise
et l’établissement d’éducation ou de formation; les apprenants y
conservent leur statut en tant que tels. Elle est régie par des
conventions de partenariat qui seront encouragées et développées, à tous
les niveaux, depuis l’école collégiale jusqu’à l’enseignement
supérieur.
51. L'apprentissage en milieu de travail et la
formation alternée, par navette entre l’établissement d’éducation et de
formation et l’entreprise, seront promus, dans le cadre d’un partenariat
organisé et durable entre les autorités d’éducation-formation centrales
et déconcentrées ou décentralisées, les chambres d’agriculture,
d’artisanat, de commerce et d’industrie et tous les groupements
professionnels concernés. Les dispositifs législatifs applicables à
l’apprentissage, soit en particulier, soit dans le cadre de la
législation du travail en général, ainsi que les règlements applicables à
la formation alternée incluront les dispositions pertinentes visant à:
a.
impliquer étroitement les partenaires susmentionnés, en matières
d’organisation, de planification, de supervision et d’évaluation de
l’apprentissage et de la formation alternée, à l’échelle régionale,
provinciale et locale;
b. établir la responsabilité partagée et
l’organisation conjointe et solidaire entre les établissements
d’éducation-formation et les entreprises d’accueil, en matière de
placement, de tutorat, de progression pédagogique et d’évaluation des
acquis professionnels de chaque apprenti ou stagiaire en formation
alternée;
c. mettre en place un système spécifique d’assurance, à
la charge de l’Etat, pour protéger les apprentis et les stagiaires en
formation alternée, ainsi que les équipements des entreprises d’accueil,
contre les risques directement liés aux activités d’apprentissage et de
formation alternée, afin d’instaurer la confiance nécessaire au
développement de ces deux modes de formation.
Formation continue
52.
La formation continue est un facteur essentiel pour répondre aux
besoins en compétences des entreprises, et les accompagner dans le
contexte de la globalisation des économies et de l’ouverture des
frontières. En permettant l’adaptation et le développement des
qualifications, suivant les évolutions technologiques et les nouveaux
modes de production et d’organisation; elle contribue à assurer la
compétitivité du tissu productif, favorisant ainsi la préservation de
l’emploi et l’accès à de nouveaux métiers et améliore, par voie de
conséquence, les conditions économiques et sociales des apprenants.
Considérant
les progrès réalisés dans ce domaine ces dernières années, il convient
de renforcer la dynamique d’investissement dans les ressources humaines
au sein des entreprises, et de sensibiliser les individus à leurs droits
et leurs devoirs en matière de formation continue.
53. Le
système de formation continue doit concerner l’ensemble des populations
en cours d’emploi ou menacées de perdre leur emploi (reconversion).
Ainsi, divers modes de formation continue doivent-ils être développés,
afin de toucher les salariés d’entreprises publiques et privées, les
employés de l’administration et des collectivités locales, ainsi que les
populations actuellement marginalisées ou insuffisamment qualifiées.
54.
La diversité des secteurs professionnels et les spécificités propres à
chaque secteur en termes de développement des compétences liées à chaque
métier exigent de mettre en place un système de formation continue
contractualisé, adapté à chaque branche professionnelle, aux niveaux
national et régional. Une attention particulière sera portée aux besoins
du monde rural et agricole. Un système de reconnaissance des acquis
sera instauré, permettant d’impliquer progressivement les secteurs
professionnels dans la gestion de leurs besoins en compétences.
55.
Le système de formation continue s’appuiera sur des actions de
différentes formes, basées sur : des bilans de compétences, permettant à
chaque individu de faire valider ses acquis professionnels et de
déterminer ses besoins en formation ; il s’agit :
- des
opérations visant l’acquisition de nouvelles compétences
professionnelles au profit des personnes expérimentées mais n’ayant pas
bénéficié d’une formation de base organisée et formelle;
- des opérations visant à actualiser et adapter les savoir-faire
d’employés disposant de compétences et de qualifications reconnues par
les entreprises ou l’administration;
- des opérations de promotion professionnelle, permettant aux
travailleurs et aux employés titulaires de certificats professionnels
d'acquérir des compétences d’un niveau supérieur;
- des opérations de reconversion, permettant aux bénéficiaires de
s’adapter aux transformations survenues dans les modes et techniques de
production.
56. Le système de formation continue sera
articulé autour de la logique du marché, seule capable d’accompagner de
manière dynamique les besoins en compétences des entreprises. Il
encouragera une implication forte des établissements
d’éducation-formation en partenariat avec les entreprises et les
administrations; il incitera au développement d’unités de formation
continue et de conseil au niveau des associations professionnelles et
favorisera la reconnaissance du lieu de travail en tant que lieu de
formation. La régulation du système, notamment par l’orientation et
l’évaluation, sera assurée en étroite collaboration entre l’Etat, les
chambres professionnelles et les salariés. Des ressources seront
affectées à l’appui aux opérateurs de formation notamment en matière de
formation de formateurs et d’ingénierie de la formation continue.
57.
La réforme du système de formation continue s’appuiera sur une loi
venant compléter ou ajuster les dispositifs existants. Dans le sens de
la mobilisation collective et de l’encouragement des individus à la
formation continue un capital temps sera réservé à cette dernière. Ce
temps sera géré dans un cadre professionnel, au titre de conventions
collectives négociées, éventuellement par branche, entre les partenaires
sociaux. Cette loi définira principalement :
- Le droit et le devoir de la formation tout au long de la vie ;
- La validation des qualifications et la reconnaissance des acquis par les bilans de compétences ;
- L’intégration du concept d’épargne temps formation dans le parcours professionnel ;
- La formation alternée des personnes en cours d’emploi ;
- Les modalités et les ressources (y compris la contribution du
salarié) de financement des actions de formations (coûts directs,
salaires …) ;
- Les mécanismes d’observation des besoins en formation continue,
afin d’anticiper sur les besoins en compétences du secteur productif et
d’adapter les cursus de formation.
58. Des ressources
stables, provenant de subventions de l’Etat et d’une partie de la taxe
de la formation professionnelle seront allouées à l’encouragement des
actions de formation continue. Ces ressources seront gérées par une
commission tripartite (Etat, employeurs, employés) et constitueront un
levier permettant d’accompagner les besoins des entreprises dans les
secteurs considérés comme stratégiques.
59. Les mécanismes de
formation continue seront développés de manière à atteindre l’objectif
de faire participer, chaque année, au moins 20% des travailleurs,
employés et fonctionnaires à des actions de formation continue. Une
attention particulière sera portée aux besoins spécifiques des petites
et moyennes entreprises.